Cornélius ou l'art de la mouscaille et du pinaillage (one-shot) FR

Synopsis

Cornélius fête à peine son seizième anniversaire et pourtant, comme le montre sans affèteries la couverture de ce livre, je ne suis plus de toute première jeunesse. Mes enfants, qui sont depuis la création de la maison mes directeurs de collections, ont conservé le derme et la prestance de leurs débuts. Pour moi, qui me suis usé dans la fréquentation des banquiers et des officines de bureautique, le constat est moins flatteur. Plus que le temps qui passe, c'est le travail, cette déplorable activité, qui transforme les adolescents en vieillards; il suffit de constater que la majorité des retraités ont plus de soixante-cinq ans pour se convaincre de cette evidence.
Les règles non-écrites du snobisme familial nous tiennent depuis toujours à l'écart des célébrations trop attendues et c'est dans cet esprit que nous avions boudé notre quinzième anniversaire au profit du seizième (une forme de flemme n'étant pas non plus totalement étrangère à ce choix). Cependant, je l'avoue, la perspective de l'évènement m'assomait par avance.
J'étais bien engagé sur la pente du renoncement lorsque la proposition de quelques étudiants venus de Bretagne d'organiser une petit surboum pour célébrer dignement notre majorité sexuelle, m'a rendu un peu de la vigueur que j'étais en train de perdre. Le soutien bienveillant de la ville de Lorient, de son École Supérieure d'Art ainsi que de sa médiathèque, la patience des équipes de Cornélius et l'amitié des auteurs qui partagent régulièrement notre cuisine ont fourni l'énergie nécessaire à la réalisation de ce livre.
Le lecteur y découvrira que le parcours qui fut le nôtre n'a pas grand chose à voir avec les mythologies qu'on fabrique sur mesure dans les maisons d'édition conventionnelles. Ici, pas d'héritier nourri au grain, pas d'entrepreneur visionnaire, pas de génie du graphisme ou de sage-femme omnipotente. Notre ligne de conduite s'est imposée d'elle même, avec le temps : du bon vin, du mauvais esprit, et du travail bien fait. Mais autant le dire tout net, nous n'étions au départ qu'une bande d'incapables. Et ce qui est devenu au fil des ans "une certaine façon de faire" n'était le plus souvent que le fruit de notre ignorance et de nos limites.
C'est sur ce point précis que j'ai voulu que ce livre s'articule, avec l'espoir secret qu'il pourra enseigner aux plus jeunes que le manque d'argent et d'expérience mène invariablement à l'échec, qui est le début de toutes choses.
En souhaitant que cette conclusion puisse servir de repère aux générations futures (et qu'elle dissuade par la même occasion les plus téméraires de venir nous marcher sur les pieds), je vous assure que je reste, pour ce soir et pour toujours.
Votre très sincère et dévoué Sagamore Cornélius.

Source : Rabat de la couverture